
Le carbone, sous ses différentes formes gazeuses (dioxyde de carbone : CO2, méthane : CH4) est au cœur de nombreux sujets de préoccupations à l’heure actuelle. Les émissions de CO2 liées notamment à l’usage du carbone fossile (pétrole, charbon)mais également à la déforestation participent à l’augmentation des concentrations de CO2 dans l’atmosphère pour atteindre aujourd’hui un niveau jamais vu depuis les 800 000 dernières années. Cette situation fait actuellement du CO2 l’un des principaux vecteurs de l’effet de serre.
Les forêts et le climat
Le carbone mais pas que…
Face à la diversité des situations rencontrées et à la variation des effets du changement climatique d’un massif forestier à l’autre, il est très vite apparu aux partenaires de Sylv’ACCTES qu’une approche exclusivement portée sur le carbone ne permettrait pas de répondre aux différentes problématiques rencontrées. Par ailleurs, la finalité commerciale inhérente aux logiques de compensation/contribution carbone, ne correspondait pas à l’inspiration des membres fondateurs.
S’adapter à chaque territoire
L’association a choisi de travailler à l’échelle des massifs forestiers, par l’intermédiaire de processus de concertation visant à retenir une approche équilibrée entre les différents services socio-environnementaux [1]rendus par l’écosystème forestier. Les scénarios de gestion soutenus par Sylv’ACCTES sont donc adaptés aux attentes et aux enjeux de terrain de chaque massif. Ils visent à répondre à l’ensemble des services socio-environnementaux dont bénéficie le territoire. Cette approche vaut aujourd’hui à l’association une reconnaissance d’intérêt général de ses actions.
Pour autant, le rôle en matière de climat des forêts, leur capacité d’adaptation et leur propension à absorber et stocker durablement du carbone atmosphérique n’est pas exclu du champ de l’analyse Sylv’ACCTES.
Le carbone dans les itinéraires de gestion Sylv’ACCTES
Le sol (horizons organiques et minéraux) est le principal réservoir de carbone forestier puisqu’il contient plus de 50 % du carbone séquestré en forêt (hors biomasse racinaire). A ce titre, la préservation du couvert forestier, le maintien des rémanents et du bois mort, l’absence de perturbation du sol (travail du sol, tassement) en sont les principales garanties de pérennité assurée par les itinéraires Sylv’ACCTES. Le stockage du carbone dans la biomasse aérienne et racinaire est lui directement lié à la productivité primaire de l’écosystème. La pérennité de ce stock, et donc la séquestration du carbone atmosphérique à long terme, est essentiellement dépendante de la vigueur et de la santé de cet écosystème forestier. Parmi les leviers encouragés par les itinéraires Sylv’ACCTES, le mélange d’essences permet à la fois d’augmenter la productivité de l’écosystème (utilisation complémentaire des ressources), de limiter les dégâts liés aux ravageurs ou pathogènes spécifiques (dilution de la ressource, accueil de prédateurs), et de stimuler la résilience face aux stress abiotiques et donc aux aléas climatiques (tempéraments et stratégies complémentaires des essences, brassage génétique). Enfin, sur les arbres destinés à produire bénéficiant du travail d’amélioration, le gestionnaire, dans le cadre de Sylv’ACCTES, aura systématiquement la volonté d’atteindre la meilleure qualité possible. Ainsi au fil des rotations, le pourcentage de bois d’œuvre à longue durée de vie ne fera que progresser.
L’approche Sylv’ACCTES
Aux côtés des indicateurs BBP© (Bénéfice de Biodiversité Potentiel) et BCP© (Bénéfices soCio-économiques Potentiels), l’association et ses partenaires ont développés le BAP© pour Bénéfice d’Atténuation/Adaptation Potentiel. Cet indicateur est composé de deux outils :
- Un outil de calcul qui permet de modéliser la trajectoire climat de l’itinéraire sylvicole[3]. Cet outil évalue la variation du volume de CO2 stocké en forêt au fur et à mesure de la durée de l’itinéraire sylvicole. Il évalue également les proportions de différents produits : bois d’œuvre, bois industrie et bois énergie qui pourraient être récoltés sur cette même durée. En effet, le bois qui est exploité en forêt à un instant T est redirigé vers une production à plus ou moins longue durée de vie fonction de sa conformation (essence, diamètre, rectitude, branchaison ….) retardant d’autant la réémission du CO2 stocké dans le bois.
- Une grille d’analyse qui permet d’évaluer la capacité de l’itinéraire sylvicoles à combiner adaptation (résilience de l’écosystème) et atténuation du changement climatique sur une série de critères opérationnels. Les critères sélectionnés pour cette grille permettent d’évaluer la réversibilité et l’exposition aux risques du scénario de gestion sylvicole proposé dans un contexte de changement climatique.
Ces deux outils ne répondent pas aux exigences d’additionnalités et de permanence nécessaire pour la valorisation financière de crédit carbone. Toutefois, de manière combinée, ils permettent à la fois de rendre compte d’une trajectoire climat et de sa probabilité de réalisation dans un contexte climatique en évolution. Cette démarche qualitative, comparable à celle qui est suivie pour les indicateurs de biodiversité est en phase avec les objectifs de favoriser la multifonctionnalité défendue par Sylv’ACCTES.
L’enjeu pour Sylv’ACCTES est donc, sur ce volet climat, d’accompagner des trajectoires de gestion des forêts qui doivent permettre d’abord de stabiliser et/ou pérenniser le réservoir de carbone local face aux aléas du changement climatique. Aussi, le plan de contrôle mis en œuvre annuellement s’attache à contrôler la bonne tenue des trajectoires de gestion garantissant ainsi l’atteinte des objectifs préalablement définis à l’issue de la concertation locale.
Modèle de la grille d’analyse pour le PST d’Arlysère
[1] Services socio-environnementaux : Egalement appelés services écosystémiques, ils englobent les rôles de protection (risques naturels, eau, paysages, biodiversité…), de production (bois notamment mais également champignons, baies…) et d’accueil.
[2] Itinéraire sylvicole : Suite d’opérations de sylvicultures (travaux et coupes) déployés à travers le temps pour atteindre un objectif sylvicole (volume de bois, composition en essences…), c’est la feuille de route du gestionnaire forestier.